Ce soir la nuit n'est pas venue Pierre Louki Ce soir, la nuit n'est pas venue Le soleil nonchalant flemmarde Une invitation campagnarde L'a retenu En avait assez, le soleil, De cette vie de funambule De l'aube jusqu'au crépuscule Toujours pareille Et, bien avant soleil couchant, Il a stoppé sans plus attendre À l'abri d'un petit bois tendre Comme le sous-préfet aux champs Il était au bout du rouleau Toujours tourner, tourner sans trêve Près d'un ruisseau, enfin, il rêve La tête à l'ombre et pieds dans l'eau Il a pendu sa montre au clou Tant pis pour le cadran solaire Plus de rendez-vous, plus d'horaires Un point c'est tout Ce que les nocturnes en diront? On verra bien, il s'en balance Il avait besoin de vacances Ils attendront! Et toi et moi ne savons plus Regards rivés sur la pendule Quel est ce temps qui capitule Pourquoi tout ce jour superflu? Et notre divan qui sait tout De nos moindres joies, moindres plaintes Attend vainement la mi-teinte Du soir, pour se donner à nous Hors du temps où le soleil s'étend Bien aise, il étale sa flamme Y a pas de quoi en faire un drame On ira au bout tout autant Le monde entier scrute les nues Au ciel, les étoiles s'inquiètent Phébus flâne dans les violettes Ce soir, la nuit n'est pas venue