Hortense a soufflé tant de bougies Et vu fleurir autant de printemps Que l'hiver un matin sans faire de bruit A versé sur elle ses neiges d'antan Il est grand temps de dire adieu A ce qui faisait son bonheur Le p'tit pavillon de banlieue Et son jardin planté de fleurs Quand au vin blanc sous les tonnelles Qui lui rappellent ses vingt ans Elle chantera avec d'autres vieilles Dans cette retraite loin de nos gens Hortense ne regardait jamais Les aiguilles de horloges qui pourtant tournaient Elle pensait ne jamais subir le poids des ans Cette putain de dérive des incontinents Désormais seule dans son fauteuil Dans cette chambre aux murs tapissés De photos qui sont autant de deuils Qu'il y a de jours dans l'année Elle pleure le temps des cerises Et celui du muguet Les amours qu'elle a connu exquises Dans la douceur des premiers mai Le dimanche est un jour de gloire La cerise sur le gâteau Quand sa descendance vient la voir Entre seize heures et seize heures deux C'est pas une famille c'est du malheur en pire La chair à notaire, la graine de maffieux Attendant l'héritage et ce dernier soupir Qui donnera le signal de ce bonheur honteux Quand elle aura gagné ses ailes Qu'importe qu'elles mènent au paradis La seule chose qu'elle demande pour elle C'est de ne jamais revoir ces pourris Qui du pavillon de banlieue Et du jardin planté de fleurs N'ont rien trouvé à faire de mieux Qu'une aire de jeux pour promoteur