J'AI VU Bien sûr, j'ai vu des amours infinis finir Et j'ai même vu mourir des immortels Et j'ai vu des chemins qui n'menaient pas à Rome Et j'ai cru en des dieux inventés par des hommes Et j'ai vu tous ces rêves pourtant immatériels S'envoler en poussière pour ne plus revenir Avalés par le ciel Puis, j'ai vu le grand mur de la réalité Là où les certitudes vont pour s'y fracasser Et j'ai vu des valeurs perdre toute leur valeur Et j'ai vu des beautés soudain devenir laideurs Et des vies s'écraser, là sous le poids des heures Jours, semaines, mois, années trahissant leurs acteurs Sans la moindre pitié Et j'ai vu des familles à la rue et sans rien Et j'ai vu des hôtels trois étoiles pour chiens Et j'ai vu des jardins délaissés inconnus Et puis des dépotoirs s'étendre à perte de vue Et le mépris devenir un genre de mode de vie Où tout peut bien se vendre, ballons, jouets, armes ou gants Faits par des mains d'enfants Et j'ai vu des conflits inutiles et faciles Et j'ai vu des amours sincères et impossibles Et j'ai vu de l'amour devenir de la haine Et des gens qui m'aimaient tout en m'offrant des chaînes Et j'ai vu tous ces gens préférer impassibles Un malheur certain à un bonheur possible Et se vêtir de peine Il serait prévisible qu'après tout c'que j'ai vu Je ne veuille plus rien voir, je ne veuille plus rien savoir Il serait presque risible qu'après tout c'que j'ai vu Je veuille encore vouloir Mais pourtant... Année après année, quand s'achevait l'hiver J'ai vu naître un printemps fidèle à sa saison Et j'ai vu émerger l'herbe et les pissenlits Comme un cri à la vie dans les fentes du béton J'ai vu des inconnus s'unir pour reconstruire Et puis des vies sauvées par un simple sourire Ou un simple je t'aime Et moi pour ton je t'aime, je remets tout en jeu J'oublie tout c'que j'ai vu et m'abreuve à tes yeux Et moi pour ton je t'aime, je remets tout en jeu J'oublie tout c'que j'ai vu et m'abreuve à tes yeux