Ne t'en vas pas,
J'me suis pas préparé du tout à t'regarder
Plonger à pieds joints dans ce trou creusé pour toi
Et au dessus duquel un curé te survivra
En prônant des absurdités.
Je hais déjà,
Celui qui aurait maquillé d'un teint trop mat,
Ton doux visage inanimé,
Ne t'en vas guère,
Je n'connais même pas les fleurs que tu préfères,
Pour te les j'ter par dessus coeur.
Ne t'en vas pas,
Te confiner aux oubliettes je n'suis pas prêt,
A te coiffer de cette croix
Où l'on aurait gravé ton nom avec des dates
Que l'on planterai comme un vulgaire plant de tomates.
Ne t'en vas pas,
Nourrir ce grand champ de squelettes, ne t'en vas pas,
Ne fais pas ça se serait trop bête,
Vas-y respire, n'écoute pas ces maudits docteurs,
Qui traîtent ton coeur comme un fossile, comme un souvenir.
Ne t'en vas pas,
Ca f'rait trop de monde à consoler, tant pis pour toi,
T'avais qu'à pas tant nous aimer, j't'achèterais pas,
De jolie boîte en bois vernis
Reviens chez toi,
Dans ta maison et dans ton lit.
Dis moi quel ange,
Dis moi quelle volonté divine voudrait qu'tu manges,
Des pissenlits par la racine,
Ca doit déjà
Etre bourré d'âmes au firmament et t'as pas l'droit,
D'abandonner femme et enfant.
Vas-y bats toi,
T'es un vrai lion, sors nous tes griffes,
Ne t'endors pas,
A l'étage des soins intensifs,
C'est pas ton heure et ce n'est pas demain la veille,
Que ton grand coeur aura à c'point besoin de sommeil.
Ne t'en vas pas,
J'vais t'en payer des grands voyages où tu voudras,
Au grand Canyon ou à la plage,
Mais pas là-bas où l'monde débarque sans bagages,
Je sais qu't'es pas encore rendu au bout de ton âge.
C'est pas fatal simplement parce que c'est critique,
Je sais qu't'as mal je suis peut-être égocentrique,
Mais j'te l'demande,
Parce que je l'sais que j'm'en remettrais pas, ne t'en vas pas,
J'me sens pas encore grande, pas assez forte,
Pour te laisser aller cogner,
A la vieille porte d'une gourmande éternité,
Reviens chez toi et laisse le ciel
Te mériter.