Autrefois y avait des gens Qui ont dit "Faisons des villes Pour enterrer nos frayeurs Ce s'ra plus simple à plusieurs Ce s'ra plus simple à beaucoup Derrière nos murs de pierre L'oeil collé aux meurtrières De chasser les hordes de loups De chasser tout ce qu'est pas nous Etrangers pestiférés Truands, saltimbanques, filous Juifs errants et faux prophètes Jour et nuit, de la lumière Temples d'or chatoyants Rumeurs douces de la vie Tous les samedis la fête L'âge d'or des villes vint Vils phares éblouissants Vers qui vont tous les désirs Et les rêves de continents Et puis les villes ont grandi Sont devenues boulimiques Monstrueuses et hystériques Bouffant tout, ne rendant rien Gigantesques, tentaculaires Boursouflées et hydropiques Pestilentielles et criardes Concentrationnaires, blafardes Villes mutilées dans leur corps Qui exhalent des senteurs De mille tortures chimiques Cadavres très avancés Nous, nous sommes les produits D'une de ces saloperies Ça s'appelle Paris-Lumière Ça agonise comme Venise Et sous les ponts de Paris Coule massivement la mort Sous les ponts de Paris Coule la Seine... et la merde Nous, nous sommes les produits D'une de ces saloperies Où l'un est l'ennemi de l'autre Retranché, aveugle et muet Chacun fait sa propre geôle Dans un désert surpeuplé Des millions de morts s'agitent Dans un flot d'indifférence Tu me croises, je te croise Et vite nos regards s'évitent On se frôle par accident C'est la décharge électrique Les nourritures éclectiques Ensachées dans du plastique Vont faire de nous des mutants Grosses têtes et corps éthiques Et bientôt le Centième Plan Bétonnera notre cerveau Plus jamais d'insurrection Grâce au conditionnement Alors nous, naïvement Pour nous sauver du néant Par nos guitares fluettes Nos ridicules voix aphones On balance nos curieux chants Chants dérisoires, inutiles Essayant juste un moment D'être avec vous, vous avec nous Puis après comme si souvent Dans la salle morte et déserte La solitude va rentrer Nous aider à tout ranger Dans la nuit les bagnoles vont Vers l'hôtel aseptisé Dont les murs pissent une musique De pauvres musiciens châtrés Et dans le lit seul et froid Mains en coquille sur le sexe Comme un foetus dans un ventre Rêve enluminé d'enfant