Tous les jours, retrouver ses yeux égarés À tâtons, une à une ramasser ses dents Se refaire une bouche pour aimer Tous les jours, remettre le coeur à la bonne place Là où ça fait mal À chaque matin, démembré Jambes et bras cassés Recoudre les éclats d'un miroir fracassé Qui renvoie l'image floue, embuée De l'aliéné qui travaille à sa perte Comme un fou, un forcené À chaque matin se déprendre, se délier les mains Reprendre le terrain perdu À chaque matin, regagner sa solitude (solitude) Une fois secouées la torpeur et l'hébétude Tous les jours se souvenir de toi pour mieux voir Refuser d'aller sans désir et sans mémoire À chaque matin (oh oh oh oh...), éviter que ça devienne une habitude De mourir à soi-même comme tous ceux-là qui capitulent Il ne faut qu'une nuit pour s'endormir Se rêver éveillé durant des siècles sans se souvenir Qu'il ne faut qu'un jour pour s'en sortir De cette vie rêvée où rien n'arrive Tous les jours, parano Se méfier même des mots De l'esprit derrière la lettre, souvent collabo Entendre ce qui nous sape même jusque dans la langue Lorsqu'on la parle et qu'on la regarde comme un bilingue Dans la plaie, tremper la plume pour qu'elle saigne Une parole qui désenchante et désenchaîne Pas celle qu'on nous sert de plus en plus À la Première Chaîne Trouver les mots qui mettent ta main dans la mienne Refuser qu'on nous dise que c'est une bêtise Comme tous ceux-là qui chantaient le temps des cerises Saisir une fois pour toutes qu'épouser la résistance C'est vivre le vrai début de notre appartenance Comprendre, y a rien à comprendre Quand la raison t'explique qu'il faut se rendre à l'évidence (oh oh oh oh...) Renoncer, c'est être libre de disparaître sans plus attendre Chacun pour soi dans le confort et l'indifférence Il ne faut qu'une nuit pour s'endormir Se rêver éveillé durant des siècles sans se souvenir Qu'il ne faut qu'un jour pour s'en sortir De cette vie rêvée où rien n'arrive Tous les matins, entendre la voix d'André Fortin Celle de tous ces suicidés sans destin Connus ou anonymes, morts seuls dans leur chambre Tandis que hurle, dehors, novembre Refuser net qu'on évite le mal En parlant enfin de maladie mentale Car, être solidaire, c'est se montrer responsable Et parler pour que cesse l'aliénation nationale Nous n'aurons de repos que lorsque nous serons libres Ce n'est pas un vain mot, oui! et ça devient possible Les mots ne sont plus vains parce qu'ils nous font vivre Je me souviens que je n'veux plus mourir Nous n'aurons de repos que lorsque nous serons libres Ce n'est pas un vain mot, oui! et ça devient possible (oh oh oh oh...) Les mots ne sont plus vains parce qu'ils nous font vivre Je me souviens que je n'veux plus mourir