Voici l'histoire bien ordinaire Qui m'est arrivée cet hiver Cette histoire, c'est un peu la vôtre Car elle n'arrive pas qu'aux autres Un jour, le grand patron m'a dit Monsieur Machin, on vous r'mercie" Et j'ai jamais r'trouvé d'boulot Une compression de personnel Fut mon dernier cadeau d'Noël Alors tout s'est accéléré Mon existence a basculé Depuis j'habite rue de nulle-part Comme ça, ça m'est tombé dessus Certains choisissent d'être clochard Moi j'ai pas choisi d'être à la rue Ça s'est passé en moins d'six mois Avant je vivais comme toi Maintenant je dors dans un caniveau Avec mes sacs et mon manteau Les règles du grand capital M'ont tout volé, même le vital Le nécessaire avant l'envie Ma vie est dev'nue la survie Ma maison, c'est un carton D'emballage IKEA C'est là que j'bossais comme un con Avant qu'ils aient plus besoin d'moi "J'ai faim" marqué sur un panneau Je fais l'mendiant dans le métro Ça fait bizarre, je vous assure D'plus voir les gens, mais leurs chaussures Et croyez pas que ça m'amuse De devoir faire mon p'tit numéro Du "Messieurs-dames, je m'excuse Une pièce ou un ticket-resto" Ça s'est passé en moins d'six mois Avant je vivais comme toi Maintenant je dors dans un caniveau Avec mes sacs et mon manteau Les grandes vacances toute l'année Et les joies du camping forcé Je vous l'souhaite pas, mais méfiez-vous Un jour ça tomb'ra p't-êt' sur vous Peut-être qu'un jour ce s'ra vot' tour D'aller crever au pied des tours L'oeil ébloui par la lumière Des grands fabricants de misère Les belles multinationales Qui font des pauvres et des maudits Des millions d'gens qui crèvent la dalle Pour la cinglerie du profit Et quand arrivera l'euro Vous n'en verrez pas la couleur Ce s'ra les mêmes qu'en auront trop Messieurs mesdames, à vot' bon coeur Ça s'est passé en moins d'six mois Avant je vivais comme toi Maintenant je dors dans un caniveau Avec mes sacs et mon manteau Alors vous vivrez l'aventure Que vivent les nouveaux clodos Car dans la rue, la vie est dure La rue, ça fait pas de cadeau Assis sur le banc de touche Non, vous n'aurez pas le choix On vous mènera d'force à la douche Que vous soyez sale ou pas Pour conserver bonne apparence Vous vous raserez tous les matins Et les jours de grande affamance Vous volerez les grands magasins À un feu rouge, pour dix francs À des gens tous indifférents Vous s'rez vendeur du Lampadaire L'hebdomadaire de la galère Ça s'est passé en moins d'six mois Avant je vivais comme toi Maintenant je dors dans un caniveau Avec mes sacs et mon manteau Oui, mais je sais qu'un jour viendra Un jour le vase débordera Les pauvres, on se réunira Voilà ce qui arrivera En ayant marre d'être cocus Tous les exclus de la galette On viendra r'prendre notre dû Cette fois, c'est vous qu'aurez les miettes Comme y aura pas d'autre solution On ref'ra la révolution Des millions d'pauvres dans la rue Ça peut vous foutre un beau chahut Et on s'en ira pique-niquer Sur les pelouses de l'Élysée Et ce jour-là, planquez l'artiche Y f'ra pas bon être trop riche Ça s'est passé en moins d'six mois Avant je vivais comme toi Maintenant je dors dans un caniveau Avec mes sacs et mon manteau Les grandes vacances toute l'année Et les joies du camping forcé Je vous l'souhaite pas, mais méfiez-vous Un jour ça tomb'ra p't-êt' sur vous